Seule la paix rend possibles le progrès et le développement

João Barreiros, syndicaliste portugais :
« Exiger la paix est un acte de classe »

Tribune publiée le 29 avril 2025 dans l’Humanité,
João Barreiros est membre du comité exécutif du CGTP-IN, secrétaire aux relations Internationales (Portugal).

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Sous la houlette de la Commission européenne, les Vingt-Sept ont engagé une course aux armements. Des syndicalistes du continent livrent des clés pour la construction d’une économie de paix.

Ces derniers mois, l’idée d’un conflit mondial s’est installée en toile de fond dans nos vies. Un chœur de guerre, accordé sur l’axe atlantique, entonne des menaces, désigne des ennemis et impose la peur. Les États-Unis s’en tiennent à leur vieux scénario pour enrayer leur déclin et inverser leur perte d’influence relative, en désignant la Chine comme ennemi principal. Que ce soit sous l’administration Trump ou une autre, l’intrigue se répète.

Les États-Unis, profitant de leur domination sur les institutions financières, de leur puissance militaire, du dollar imposé comme monnaie de référence, misent sur l’agression, sans épargner leurs alliés, militarisent les relations internationales, et cherchent à s’assurer le contrôle des routes commerciales et des ressources naturelles.

On entonne le discours de la nécessité d’un réarmement européen, en ignorant que les dépenses militaires des pays européens représentent déjà un quart du budget militaire mondial. Le maintien et l’expansion de l’Otan n’ont jamais été faits au nom de la défense de l’Europe. Ils ont plutôt engendré d’énormes tensions et conflits, comme dans les Balkans, et ont visé, militairement et politiquement, à sauvegarder les intérêts des États-Unis sur le continent – comme ils le font partout dans le monde avec l’imposition de bases militaires, les sanctions, les blocus, la promotion de coups d’État et de déstabilisations.

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Le monde n’est plus celui d’il y a cent ans, mais la cupidité du capital demeure inchangée. La guerre, l’extrême droite et les forces réactionnaires restent quelques-uns de ses meilleurs outils.

C’est là qu’entre en jeu la toujours actuelle question de classe. Du secrétaire général de l’Otan à l’Union européenne, la rengaine est claire : couper dans la santé, l’éducation, les salaires, les droits. Tout pour la sécurité – mais pas celle du peuple. Les règles et les restrictions de la gouvernance économique, si sacrées lorsqu’il s’agit d’investir dans les écoles ou les hôpitaux, s’évaporent lorsqu’il s’agit d’armement. Pour les chars, pas de problème. Pour les salaires, il faut se calmer.

Exiger la paix, aujourd’hui, est un acte de classe. Le capital veut des profits et veut intensifier l’exploitation des travailleurs. Pour cela, il fait appel à l’extrême droite, à la répression, à la guerre. Les travailleurs, eux, veulent des droits, le progrès et la justice sociale. Car ce sont les travailleurs et leurs enfants qui voient leurs salaires stagner, leurs retraites diminuer et les services publics disparaître au nom de la « crise » alimentée par la guerre ; ce sont eux qu’on envoie au front.

Le Portugal a ses propres exemples. En même temps qu’on parle de millions pour satisfaire les exigences de Trump, il manque de l’argent pour résoudre la crise du logement. L’investissement public est détourné vers le réarmement, comme si celui-ci était le nouveau miracle économique. Et les jeunes ? Qu’ils s’enrôlent dans la machine de guerre.

Depuis longtemps, au Portugal nous affirmons la nécessité de produire davantage. Après l’entrée dans l’Union européenne, des pays périphériques comme le Portugal ont vu des secteurs stratégiques, comme l’énergie, être privatisés ; l’agriculture, quasiment abandonnée à la demande de l’UE elle-même ; et le secteur industriel remplacé par le commerce et les services, avec des salaires plus bas et une précarité élevée. La nécessité de produire plus est donc urgente pour le développement du Portugal. L’affirmation de la souveraineté, qui nous permet de produire davantage et de diversifier nos relations commerciales, est essentielle. Mais ce développement doit être tourné vers l’avenir, et nous ne voulons pas que cet avenir soit la guerre.

Comme des millions de gens dans le monde entier, nous élevons notre voix pour exiger la paix. Car la guerre en Ukraine, au Moyen-Orient, en Afrique, n’est pas le fruit du hasard. Elle est alimentée par des ingérences, des intérêts économiques, des luttes de pouvoir, un appétit vorace pour les ressources naturelles, ainsi que par les intérêts des grandes entreprises de l’armement, dont les profits ont explosé.

Il fut un temps où, face aux dérives bellicistes, certains ont su conclure des accords pour garantir la sécurité collective. L’histoire montre que plus d’armes ne signifie pas plus de sécurité : elles nourrissent de plus grands dangers, des intentions d’usage et le choix de la destruction. Personne ne dépense des millions pour laisser les armes au repos.

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À la CGTP-IN, nous n’avons aucun doute : nous défendons la paix, sans reculer d’un pas. Il est nécessaire que les travailleurs et les peuples se mobilisent pour défendre le droit de vivre en paix et le respect du droit international établi après la Seconde Guerre mondiale. Il est temps de ramener à la raison ceux qui promeuvent et cherchent la guerre. Il est temps de lutter pour le respect du droit international, pour le respect du traité de non-prolifération des armes nucléaires, des conventions sur l’usage des armes biologiques, chimiques ou conventionnelles, pour le désarmement général et contrôlé et la dissolution des blocs politico-militaires.

L’histoire démontre que la force organisée des travailleurs est une force de transformation. Lorsque les intérêts de ceux qui gagnent et profitent de la guerre sont remis en cause, le progrès devient réel. Construisons l’unité dans la guerre contre la pauvreté, le chômage, les bas salaires, le racisme et les discriminations. Construisons l’unité dans la solidarité avec les peuples victimes de conflits, d’ingérences et de blocus. Exigeons la fin de la guerre, la fin du génocide en Palestine, la fin du blocus contre Cuba.

Face aux « kits de survie » qu’on veut nous faire avaler, brandissons le kit de résistance contre ceux qui imposent la peur pour nous priver de la lutte, de l’organisation et des droits. C’est nous qui produisons tout, soyons capables de défendre nos intérêts. Pour cela, il est toujours temps.