Droits de douane. Ils ont capitulé pour leurs profits contre l’emploi et le climat, résistons pour changer !
L’analyse de la commission économique du PCF
Des droits de douane multipliés par neuf, 750 milliards de dollars d’hydrocarbures ultra-polluants et d’armements US à importer de force, 600 milliards d’investissements outre-Atlantique qui n’auront donc pas lieu sur le Vieux continent, un espoir de réouverture du marché US de l’acier à condition que l’UE aide les États-Unis à y affronter les pays émergents, des clauses géostratégiques inconnues dont on ne doute pas qu’elles visent à enrôler encore davantage les États européens derrière les entreprises belliqueuses de l’impérialisme étatsunien…
L’image d’Ursula von der Leyen capitulant sur les terres écossaises de Donald Trump couvre l’Union européenne de honte devant les peuples du monde entier. Elle offre une victoire politique facile au despote grotesque de la Maison Blanche et un encouragement à tous les nationalistes, apprentis fascistes qui, de ce côté de l’Atlantique, rêvent de l’imiter. Elle renforce la dépendance technologique et militaire, voire la soumission, des États du continent pour un plat de lentilles, les profits de quelques multinationales apatrides.
Mais cette image est bien commode pour couvrir la lâcheté d’un François Βayrou ou d’un Bruno Retailleau qui versent aujourd’hui des larmes de crocodiles mais qui portent la responsabilité de cette déroute, autant et plus que celle qu’ils ont laissée à la tête de la Commission européenne et dont ils n’ont en rien modifié la façon d’agir.
Ils ont accompagné une à une les fermetures en France d’entreprises décisives. Ils ont passé leur temps à saper les efforts de recherche, la montée en niveau de nos compétences jusqu’au présent budget de super-austérité, là où il faut un projet de développement. Ils continuent les aides publiques massives aux profits et au capital sous prétexte de développer « l’offre » qu’ils démolissent avec leur politique de « baisse du coût du travail » qui n’est que suppressions d’emplois et écrasement des salaires. Ils admirent la « danse du ventre » annuelle du président de la République à Versailles pour attirer le capital US. Ils n’ont même pas tenté de faire jouer les « instruments anti-coercition » mis tout récemment – décembre 2023 – par l’Union européenne à la disposition des États membres pour résister en pareil cas.
Cette capitulation est aussi une « collaboration » de « nos » capitalistes, dont la patrie a pour capitale Wall Street bien plus que Paris, Bruxelles, ou même Francfort. Dès la semaine dernière, Bernard Arnault n’avait-il pas donné le ton ? « Nous ne pouvons pas nous permettre de nous brouiller avec les États-Unis… il est donc indispensable que l’Europe trouve un accord à l’amiable » avec Trump, avait-t-il affirmé dans un entretien au Figaro. E. Macron et son gouvernement se sont exécutés.
Les conditions imposées par Trump menacent l’Europe d’une récession, et d’une exacerbation du « chacun pour soi » entre États membres de l’UE, dont l’étalage a mis en évidence les faiblesses politiques mais surtout économiques et technologiques de nos économies. Ainsi, le BDI, organisation du patronat allemand de l’industrie, dénonce les « immenses effets négatifs » de l’accord… mais c’est pour réclamer encore plus de déréglementation au nom de la lutte contre la « bureaucratie », et plus d’exportations allemandes vers le reste de l’Union européenne !
Ils ne veulent pas changer de logiciel ! Les dirigeants politiques et patronaux français, de leur côté, ne savent réclamer qu’un libre-échangisme encore plus débridé et des baisses de dépenses publiques. Et précisément, alors que François Bayrou occupe la galerie médiatique en dénonçant la « soumission », son ministre de l’économie Éric Lombard négocie des baisses de droits de douane, lobby par lobby. C’est-à-dire la poursuite du libre-échangisme.
Une voie pour résister à Trump en ouvrant la perspective d’une mondialisation de paix et de coopération
Nous sommes arrivés au stade où le libre-échange comme règle unique du marché international met à ce point en cause l’emploi et le modèle social que même les Etats-Unis réagissent… pour imposer encore pire. Il est au contraire temps d’engager un tournant pour maîtriser les échanges internationaux afin qu’ils développent l’emploi et les biens communs (santé, climat, …) dans le monde entier, du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest.
En réalité, c’est précisément l’austérité, le démantèlement des services publics, toute une logique mettant l’économie au service de la rentabilité d’un capital financier inondé d’aides publiques, qui détruisent et précarisent l’emploi dans l’industrie et les services, privent ainsi nos entreprises des talents dont elles auraient besoin, font exploser la pauvreté et l’exploitation au travail, et produisent l’affaiblissement stratégique dont le rapport Draghi avait pourtant fait un constat accablant.
C’est de cette spirale qu’il faut se dégager pour pouvoir résister à Trump et à la montée des périls qui accompagnent la réaction du capital monopoliste à sa crise. Mais nos dominants nous rejouent Munich 1938 sur le mode « plutôt Trump que toute sorte de Front populaire » !
Une nouvelle alliance de l’Europe avec les pays émergents et le « Sud global » aurait la force d’imposer pacifiquement aux États-Unis une négociation pour un nouvel ordre économique international.
Il faut viser le développement en commun de tout le potentiel humain et technologique pour une nouvelle production écologique et sociale, répartie de façon équilibrée dans le monde entier, puissant facteur de paix et de progrès. Il faut pour cela des protections sociales et écologiques orientés sur les produits et les entreprises productrices, non pas sur les pays. Nous sommes en faveur de protections et promotions écologiques et sociales et récusons autant le libre-échangisme fou que le protectionnisme nationaliste et souverainiste.
Dans l’immédiat, nous serions bien plus forts pour répliquer à la guerre commerciale de Trump, comme l’a fait la Chine, si des mesures de rétorsion douanière servaient à protéger une priorité donnée au développement des capacités humaines pour muscler nos économies et rattraper le retard européen dans la révolution informationnelle.
Pour cela, il faut baisser de tout autres coûts que ceux du développement des capacités humaines, de l’emploi efficace. Il faut s’attaquer au coût du capital, dividendes, intérêts bancaires, survalorisation boursière, délocalisations, excès d’investissement contre l’emploi. Un chemin pour y parvenir peut passer, dans l’immédiat, par cinq propositions à partir de la France :
- Un moratoire (en France) sur les plans de licenciements et la mobilisation du pôle public bancaire pour baisser le coût et les prélèvements du capital au service de contre-propositions de progrès.
- Un Fonds européen solidaire pour les services publics.
- Une pénalisation des exportations de capitaux vers les États-Unis et une transformation de notre fiscalité sur les entreprises.
- La mise en place d’un véhicule national de financement du budget de l’État par des avances à bas taux du pôle public bancaire national.
- La transformation des aides publiques aux entreprises pour qu’elles incitent à développer l’emploi et à préserver l’environnement…
… et par trois négociations internationales :
- avec les pays européens partenaires pour une coopération de nos pôles publics bancaires et financiers nationaux.
- avec les pays du Sud global, dont les BRICS, pour des traités de maîtrise des échanges et investissement internationaux visant le développement de l’emploi et des biens communs (santé, environnement…).
- pour l’ouverture d’une conférence financière et monétaire mondiale de financement des biens communs (à partir des objectifs de développement durable de l’ONU) et de financement des dettes publiques par une monnaie mondiale véritablement commune, pour sortir du système dollar.
Et en Europe,
– il faut ouvrir le débat pour la mise en place d’un plan massif de développement technologique et humain, pour une nouvelle offre productive, d’un nouveau type, écologique, sociale et répartie de façon équilibrée entre les pays européens, faite d’industrie et de services ;
– il faut financer ce développement par des avances massives au service de la formation, de l’emploi, de la recherche, des capacités humaines, des services publics et d’un autre investissement des entreprises, efficace socialement et écologiquement. Donc des avances sorties des griffes des marchés financiers, en mobilisant la Banque centrale européenne, institution publique décisive qui doit cesser d’accompagner la finance, les délocalisations et les reculs.
Sans attendre la rentrée, le Parti communiste prend les initiatives nécessaires pour mettre ces propositions à la disposition de nos concitoyennes et concitoyens.
Nous voulons contribuer ainsi au succès des mobilisations qui doivent mettre en échec les mesures d’austérité annoncées par François Bayrou qui ne feront que fragiliser encore plus la situation. Nous agirons pour permettre à ces mobilisations d’ouvrir une perspective politique capable de relever notre pays et l’Europe de la capitulation face à Trump, autre face d’une même politique au service du capital.
Un grand débat doit s’ouvrir dans le pays. Il est grand temps de changer de modèle de développement. Au-delà des Parlements français et européens, qui doivent bien sûr être saisis pour débattre de cette décision de la Commission de Bruxelles, le peuple français doit aussi en débattre et être consulté.
Mais nous nous emploierons à ce qu’il puisse agir sans attendre pour empêcher ce terrible mauvais coup et y résister.
La commission économique du PCF
Voir le site www.economie-et-politique.org
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